Mis à jour le 4 octobre 2023
Spotify envisage de se retirer de l’Uruguay en raison de modifications proposées à la législation sur les droits d’auteur
Spotify, le géant du streaming musical, envisage de se retirer de l’Uruguay en raison des modifications proposées à la loi sur les droits d’auteur dans le pays. Ces modifications ont été initiées par la Société uruguayenne des interprètes (SUDEI) plus tôt cette année, qui réclame des révisions de la réglementation sur les droits d’auteur dans le domaine musical.
L’examen des modifications par le Parlement uruguayen
Le Parlement de l’Uruguay examine cette semaine un projet de loi budgétaire qui comprend ces changements proposés, les articles 284 et 285 du projet de loi sur la Rendición de Cuentas.
Selon le journal local El Observador, la SUDEI a réussi à faire inclure ces deux articles dans la Rendición de Cuentas grâce au pouvoir exécutif du gouvernement. La porte-parole de la SUDEI, Gabriela Pintos, a déclaré à El Observador que le groupe n’est pas opposé aux plateformes, mais qu’il milite pour une répartition équitable des revenus.
Les modifications proposées
L’article 284 prévoit d’ajouter les « réseaux sociaux et Internet » comme formats pour lesquels les interprètes ont droit à une rémunération financière en cas de reproduction d’une chanson. Selon Bloomberg Línea, cet article élargi permettrait d’inclure les réseaux sociaux et Internet dans la législation sur les droits d’auteur en Uruguay.
Bloomberg Línea explique également que l’introduction de l’article 285, qui se concentre davantage sur la question, consacrerait le « droit à une rémunération juste et équitable » pour tous les accords conclus par les auteurs, compositeurs, interprètes, réalisateurs et scénaristes en ce qui concerne leur faculté de communication publique et de mise à disposition du public de phonogrammes et d’enregistrements audiovisuels.
Les inquiétudes de Spotify
Spotify a envoyé une lettre au ministre de l’Éducation et de la Culture de l’Uruguay, Pablo Da Silveira, en juillet, dans laquelle il soutient que les modifications proposées impliquent « un paiement obligatoire supplémentaire pour les services musicaux ». En d’autres termes, Spotify affirme que si les amendements sont adoptés, il pourrait être contraint de « payer deux fois la même musique », ce qui mettrait en péril ses activités sur le marché uruguayen.
Dans sa lettre, Spotify met en garde contre un éventuel retrait du marché si les modifications proposées sont adoptées. L’Association latino-américaine d’Internet (ALAI) a également exprimé ses inquiétudes, mettant en garde les sénateurs contre les conséquences potentiellement importantes de ces changements sur plusieurs secteurs, notamment la société civile, l’industrie culturelle, l’éducation, la recherche et le développement technologique.
L’importance du marché uruguayen pour Spotify
Le retrait éventuel de Spotify du marché uruguayen intervient alors que l’entreprise continuer de maintenir sa position dominante sur le marché du streaming en Amérique latine. Selon Netscribes, Spotify détenait une part de marché de 83% en 2021. Les données de Statista montrent que Spotify comptait 46,2 millions d’abonnés Premium en Amérique latine au deuxième trimestre de 2023.
Spotify a ajouté 10 millions d’abonnés Premium au total au cours du deuxième trimestre, principalement en Europe et en Amérique latine, selon l’entreprise. Selon Music Ally, qui cite des données de l’IFPI, l’Uruguay était le 53e marché de la musique enregistrée au monde en 2022, avec des revenus de 13,2 millions de dollars (une augmentation de 20,2% par rapport à l’année précédente), dont 64,4% provenaient du streaming musical.
Les répercussions potentielles dans d’autres marchés
Bien que l’Uruguay soit un acteur mineur dans l’industrie musicale mondiale, le débat sur l’introduction de la Rémunération Équitable dans la législation sur les droits d’auteur en Uruguay sera étroitement surveillé dans d’autres pays. Au Royaume-Uni, par exemple, l’introduction de la « Rémunération Équitable » a été vivement contestée.
L’ER a été soutenue par des artistes comme Paul McCartney, Chris Martin de Coldplay et Stevie Nicks, mais farouchement opposée par les labels indépendants et majeurs, qui soutenaient que cela « réduirait considérablement le montant total des redevances disponibles pour les labels et les artistes ».
L’application de la RE aux flux permettrait d’aligner la rémunération des artistes pour leurs redevances de streaming sur celle des artistes pour la diffusion radio au Royaume-Uni. Actuellement, une partie (50%) des redevances de musique enregistrée provenant de la radio au Royaume-Uni est versée directement aux interprètes via une société de gestion collective, ce qui contourne les contrats des maisons de disques et les dettes de remboursement des avances antérieurement versées.
Cependant, ce système de RE a été qualifié par le BPI, l’organisme qui représente les grandes maisons de disques au Royaume-Uni, de « recette pour le désastre » qui « réduirait considérablement le montant total des redevances disponibles pour les labels et les artistes ».
En novembre 2021, les maisons de disques, majors et indépendantes, étaient opposées à une proposition d’introduction de la « Rémunération Équitable » dans la loi britannique, formulée par un homme politique britannique dans un projet de loi intitulé Copyright (Rights and Remuneration of Musicians, Etc). Ce projet de loi, dit « projet de loi Brennan », a été rejeté par le Parlement britannique début décembre 2021.
En conclusion, les modifications proposées à la législation sur les droits d’auteur en Uruguay et le risque de retrait de Spotify du marché uruguayen soulèvent des inquiétudes quant à l’avenir de la rémunération équitable dans l’industrie musicale. Le débat en Uruguay sera suivi de près dans d’autres pays, notamment le Royaume-Uni, où des questions similaires se posent. L’évolution de la situation en Uruguay pourrait avoir des répercussions sur le paysage mondial du streaming musical.
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